Les tragédies grecques existaient aussi chez les mathématiciens de l’Antiquité. La découverte de la racine carrée du nombre 2 est le sujet de l’une d’entre elles, qui a trouvé une fin heureuse à l’époque moderne.
1.Un disciple de Pythagore « mesure » la diagonale du carré
La philosophie de l’école pythagoricienne voyait dans le nombre rationnel l’expression de l’harmonie de la nature et du cosmos, sur le modèle des rapports numériques simples qui exprimaient les intervalles fondamentaux en musique, découverts par Pythagore à partir des rapports de longueur du monocorde. Le mathématicien Hippase de Métaponte, disciple de l’école pythagoricienne, étudiait la « commensurabilité » (co-mesurabilité) des grandeurs géométriques. Il fut peut-être le premier à étudier la longueur de la diagonale d’un carré, en prenant le carré le plus simple, de côté \(1\).
Il établit que cette diagonale était incommensurable aux cathètes (côtés adjacents à l’angle droit, c’est-à-dire autres que l’hypoténuse dans un triangle rectangle) du demi-carré. Cela signifie qu’il n’existe aucune unité de mesure commune qui permette d’exprimer les longueurs des cathètes et la longueur de la diagonale comme multiples entiers de cette unité. En effet, par le théorème de Pythagore, dans le cas du carré de côté \(1\) l’aire du carré construit sur la diagonale est la somme des aires des carrés construits sur chaque côté, c’est-à-dire \(2\). La longueur de la diagonale doit donc être un nombre dont le carré vaut \(2\), et cette longueur ne peut donc pas être un nombre rationnel, ce qu’on savait déjà démontrer dans l’Antiquité.
2.Démontrer l’irrationalité de \(\sqrt 2\)
Selon certaines traditions, cette découverte d’Hippase, ou bien sa promulgation en-dehors du cercle des pythagoriciens, aurait précipité sa fin, les autres disciples l’ayant noyé lors d’un voyage en mer. Il est plutôt probable qu’il ait été exclu de l’école. Pour autant, sa découverte s’inscrivit dans le corpus mathématique de l’Antiquité grecque, puisqu’on y connaissait déjà une démonstration de l’irrationalité de \(\sqrt 2\), ou pour le dire dans le langage d’une civilisation qui ne connaissait pas les nombres réels : qu’il n’existe aucun nombre rationnel dont le carré vaut \(2\).
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Pour aller plus loin
La théorie élémentaire des nombres rationnels prolonge l’arithmétique naturelle des nombres entiers et prépare la théorie des nombres réels. Découvrez cette théorie et son rapport à l’irrationalité de \(\sqrt 2\) dans le cours numéro 3 du semestre I de MATHESIS :
Mathesis 1.3 : Arithmétique Elémentaire (Des nombres entiers naturels aux nombres rationnels)
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